Un fardeau, une vie de moins à porter.
Quel beau printemps est-ce là... C'est une journée où rien d'effroyable n'est permi d'exister. Une journée si magnifique, qu'une fois encore, je fais tache... Une tache monstrueuse dans ce décor d'une impitoyable beauté. En sera-t-il toujours ainsi ? Dois-je m'y résoudre ?
Le sang ne coule plus, à présent, et le corps de l'aveugle ne bouge plus, non plus. Il s'est endormit avec le levé du soleil, définitivement. Il dort paisiblement, maintenant... Et à jamais. Devrais-je l'en envier ? Je ne peux trouver des raisons suffisantes pour mettre un terme à ma misérable vie... Et ça n'est pas faute d'avoir essayer. Les dieux m'ont maudit. Ils me haïssent pour ce que je suis, et cette haine est auprès de moi comme un fantôme, chaque jour qu'ils font. Mais je ne les hais pas, moi. Je suis bien trop misérable pour cela, moi.
Cet aveugle... Je l'aimais, non ? N'était-il pas comme un père, pour moi ? Et pourtant... Et pourtant, je l'ai tué. J'ai mis un terme à sa vie, aussi pitoyable était-elle, et c'est lui-même qui m'a permi de le faire. Etait-ce le destin ? Etait-ce le sien, le mien ? Non... Je dois m'y résoudre. Je l'ai fais, car c'est mon choix. JE l'ai tué, pas la fatalité. Mais c'est étrange.. Je ne regrette rien. Le devrais-je, au fond ? En ai-je déjà eu, de ces remords, de ces scrupules qui vous blessent l'âme ? L'aveugle m'en parlait, parfois. Il disait que je ne devais pas en avoir, jamais. Il m'a donc transformé, ses plans ont fonctionné..
C'est pour cela, que je l'ai tué, non ? Je ne me souviens plus... Enfin... Est-il puni, à présent ? Non, je ne crois pas... Ses desseins sont exaucés, je n'ai plus rien d'humain, si ce n'est la fragilité. Il a gagné. Tout ce sang ne représente rien de plus... Echec et math. Je suis faible. Il est... Il était fort. J'ai perdu. Mais je me souviens... Il ne me reste plus que cela. Les souvenirs..
Cet homme m'avait trouvé, à moitié mort dans les rues de la Capitale... J'étais un seul parmi des milliers, et il m'a choisi... Enfin, c'est ce qu'il m'a dit ; mais il ne m'aurait pas menti, il n'aurait eu aucun intérêt à le faire. Il m'a apprit à vivre... Ou plutôt, il m'a apprit à tuer. À devenir une bête, rien de plus, comme lui. Il m'a apprit à survire de cadavres en cadavres, dans le sang, dans la douleur, dans la solitude, dans le froid... Dans la mort. C'est cela... La délivrance.
C'est pour cela que, maintenant, il dort.. Infiniment.
Car je lui en étais reconnaissant. Infiniment.